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Le Figaro
14-07-2025
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Tour de France : «Si je trouve, ça va faire du bruit», Nick Raudenski, l'ex-chasseur de terroristes qui traque les moteurs dans le peloton
Cet américain, passé par la lutte antiterroriste mène la lutte contre la fraude technologique sur le Tour de France. Dans une ancienne vie, Nick Raudenski «traquait les terroristes». Aujourd'hui, il cherche des moteurs dans les vélos du Tour de France. «Je ne suis pas du genre à détourner le regard. Si nous trouvons quelque chose, ça va faire du bruit», assure-t-il à l'AFP. À découvrir Le classement du Tour de France 2024 Gabarit solide, barbe drue, casquette et voix grave, l'Américain est depuis 2024 le chef de la lutte contre la fraude technologique à l'Union cycliste internationale (UCI), un fléau potentiel qui flotte comme un spectre au-dessus d'un peloton de plus en plus véloce. Publicité Il se met dans la tête des tricheurs pour les contrer «Lorsque je suis arrivé, la première chose que j'ai faite était de me mettre dans la peau d'un tricheur. Comment ferais-je pour utiliser un moteur sans être rattrapé par la patrouille? Exactement comme lorsque j'étais enquêteur criminel au sein du Département américain de la sécurité intérieure», explique-t-il. À lire aussi Dopage mécanique : comment fabrique-t-on un vélo électrique ? «J'ai travaillé dans la lutte antiterroriste. Un idiot a essayé de faire exploser un avion en plaçant une bombe dans sa semelle, et maintenant tout le monde doit enlever ses chaussures à l'aéroport. C'est la même chose dans le cyclisme», ajoute celui qui a aussi officié à la FIFA, l'UEFA et l'International Testing Agency (ITA), l'organisme indépendant en charge des opérations antidopage de l'UCI. Si la fraude technologique est souvent évoquée, le seul cas prouvé dans le cyclisme professionnel remonte à 2016 lorsque la jeune Belge Femme Van den Driessche, 19 ans, avait dissimulé un moteur aux Mondiaux de cyclo-cross espoirs. Depuis, les milliers de contrôles ont été réalisés, sans nouvelle trouvaille. «Quand j'ai été élu, en 2017, c'était un vrai sujet. D'ailleurs, j'étais un de ceux qui émettaient un certain nombre de réserves, non pas sur le fait qu'il y en ait, mais sur la manière dont on luttait à l'UCI. Donc on a désormais ces machines portatives de rayons X qui valent à peu près 50.000 euros pièce. On scanne les vélos. On les contrôle à l'arrivée. Et puis on ne s'interdit pas des démontages de vélo pour vérifier qu'il n'y a rien à l'intérieur. On le fait assez régulièrement. Et, sur ce Tour de France, ce sera peut-être le cas…», a confié sur le sujet David Lappartient au Figaro en début de Tour de France. «Pourquoi on n'a rien trouvé? C'est soit parce qu'il n'y a rien à trouver, soit parce qu'on n'y arrive pas. Cette question me hante. Je suis là pour y répondre», affirme Raudenski. Les vélos passés au rayons X Pour trouver, l'UCI renforce, année après année, son dispositif. En 2024, 192 vélos ont été contrôlés par rayons X sur le Tour de France, dont systématiquement celui du vainqueur d'étape et du maillot jaune, une augmentation de 17% par rapport à 2023. «Cette année il y en aura plus», insiste l'UCI qui a lancé en parallèle un programme de récompenses offrant des incitations notamment financières à ceux qui donneraient des renseignements exploitables. À lire aussi Le dopage mécanique, une réalité dans de nombreux sports Publicité Au dernier Critérium du Dauphiné le 13 juin à Combloux, Nick Raudenski a fait entrer l'AFP dans les coulisses de ces contrôles, depuis la ligne d'arrivée, où il intercepte les coureurs, jusqu'à la tente installée derrière le podium où sont disséqués les vélos. «Au départ de l'étape, des commissaires contrôlent les vélos à l'aide de tablettes magnétiques. Ils peuvent nous alerter par téléphone s'ils ont remarqué quelque chose en particulier», raconte-t-il. «Après on regarde la course pour voir si quelque chose sort de l'ordinaire, comme par exemple un équipier qui tire un relais particulièrement appuyé ou un coureur qui change de vélo. Ça nous permet de cibler les coureurs qu'on veut tester à l'arrivée en plus des ceux qui sont automatiquement désignés.» L'UCI vérifie aussi les vélos des coureurs qui passent un test antidopage. Pour analyser les vélos, Nick Raudenski et son équipe utilisent désormais un appareil portatif à rayons X avec lequel les techniciens, dosimètre autour du cou, scannent les machines de haut en bas. Formule 1 et drones «Ces appareils sont si performants qu'on peut voir le numéro de série, les câbles, tout ce qu'il peut y avoir à l'intérieur d'un vélo. C'est comme à l'hôpital. Ça nous évite de démonter chaque jour 30 vélos. Il n'y a pas 150 endroits pour cacher quelque chose. Et nous savons exactement ce qu'on cherche.» Raudenski assure que son équipe est «constamment à l'affût des dernières technologies», regarde ce qui se passe dans d'autres sports «comme la Formule 1» ou ausculte «les batteries de plus en plus miniatures pour faire voler les drones». Car «les progrès ont été énormes ces dernières années». Malgré tout, Nick Raudenski se dit «très confiant» quant à l'efficacité des contrôles, alors que la capacité de détection de l'UCI est parfois mise en doute. «J'ai envie que les gens y croient quand ils regardent une montée de col ou une attaque fulgurante et ne disent pas: ah voilà il utilise un moteur.» Quant aux accusations que l'UCI puisse enterrer une affaire potentielle pour ne pas nuire à l'image du sport, l'ancien enquêteur est catégorique: «c'est hors de question». «Je ne sais pas si c'est arrivé dans le passé mais détourner le regard n'est pas mon genre, assure-t-il. Si nous trouvons quelque chose, ça va faire du bruit.»


24 Heures
10-07-2025
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Éditorial: Foi de tricheur, il n'y a rien de pire que le dopage mécanique
Opinion Des assistances électriques pourraient se dissimuler sur les vélos du Tour de France. Un scandale – de ne pas en avoir sur le sien. Éditorial Publié aujourd'hui à 13h59 Le peloton du Tour de France, entre ombre et lumière. AFP Qui s'est déjà fait dépasser par un papy sifflotant l'«Hymne à la joie» en pleine montée sous le cagnard connaît ce sentiment d'injustice. Vous, vous suez des hectolitres sur votre vélo classique, arc-bouté sur les pédales, pendant que lui avale les hectomètres sur sa monture électrique, le mollet facile et la mine amène. «C'est de la triche!» Pour ceux qui ne jurent que par les décharges d'acide lactique dans les cuisses, l'aversion pour les cyclistes assistés est tenace. Alors imaginez dans le peloton du Tour de France : se promener avec un moteur caché, on appelle ça du dopage mécanique , et la sentence est irrévocable: le goudron et les plumes. Les progrès réalisés dans l'électrification des montures filent le vertige. Il suffirait d'une micropuce indétectable, dissimulée dans le moyeu de la roue, pour apporter un petit coup de boost au moment opportun. Quelques dizaines de watts supplémentaires, pas plus, juste histoire d'appuyer ce petit coup de giclette qui fait toute la différence au sommet du col. Un boxeur qui cale un fer à cheval dans son gant, des jumeaux qui se relaient sous le même dossard pour courir un marathon, un gardien de football qui réduit la taille de son but: si on ne peut même plus tricher, à quoi ça sert de jouer? Certes. Or, il y a triche, et triche. Imaginez que le papy en question se soit injecté une dose d'EPO pour parvenir à vous distancer si aisément, on pourrait au moins lui laisser le mérite du dévouement total, corps et âme, à la performance. Car les vrais dopés, eux, immolent leur santé sur l'autel de la gloire. Il y a là une approche sacrificielle: je triche, d'accord, mais j'en assumerai les conséquences en mon for intérieur, car potentiellement, j'y laisse une partie de mon espérance de vie. Le tricheur mécanique, lui, se satisfait de la vile roublardise, s'approprie les lauriers sans jamais en payer le prix. Alors la sentence est irrévocable: oui, le goudron et les plumes – à moins de nous partager discrètement les ressorts de son astuce. À lire également sur le Tour de France Newsletter «Euro 2025» Vous ne voulez rien rater de l'Euro? En vous inscrivant à cette newsletter, vous serez informé·e à temps des performances de l'équipe de Suisse et des grands moments de cette compétition. Autres newsletters Florian Müller est journaliste et chef de la rubrique sports de 24 Heures, de la Tribune de Genève et du Matin Dimanche. Après des études de Lettres à l'Université de Genève, il rejoint les rédactions du groupe Tamedia en 2010. Plus d'infos @FloMul Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.